MATMUT INFO #34 • 3e TRIMESTRE 2015

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Fondation Paul Bennetot

Le traumatisme crânien léger : parfois de lourdes conséquences

Un accident à la tête peut se produire dans toutes les activités de la vie : en voiture, au travail, à la maison, ou en faisant du sport (environ 10 % des cas). Traumatisme crânien, le terme inquiète toujours. Sous le choc le cerveau secoué brusquement se cogne de part et d’autre de la boîte crânienne. Les conséquences sont très variables, de l’urgence vitale, à de simples troubles. Simples troubles ? Pas si sûr. Le traumatisme crânien léger peut avoir des conséquences pénibles, affectant l’autonomie des victimes, même s’il est qualifié de « léger » lorsque la perte de connaissance est brève.


Comment repérer les cas où les symptômes vont persister, voire s’aggraver, dégradant la vie quotidienne et le travail des personnes ? Jusqu’à présent il n’existait guère de prise en charge reconnue. Les malades vont de généralistes en psychiatres et autres spécialistes. Les examens complémentaires sont généralement normaux, l’évaluation des préjudices est très difficile à faire, en l’absence de toute échelle d’invalidité applicable à leur cas. Pourtant, la souffrance est bien là, souvent accompagnée de difficultés économiques. Alors comment agir ? Une prise en charge précoce pourrait-elle améliorer le sort de ces malades ?


La Fondation Paul Bennetot, fondation du Groupe Matmut, a décidé en 2011 de financer un projet de recherche clinique proposé, sous la direction du professeur Nozar Aghakhani, par l’Institut pour la Recherche médicale sur la Moelle épinière et l’Encéphale (IRME) portant sur l’efficacité d’ « une prise en charge neuropsychologique chez les patients ayant subi un traumatisme crânien léger » dont les résultats ont été publiés.

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10 000 blessés souffrent de séquelles persistantes

Si le traumatisme crânien est une banalité pour les services d’urgence des principaux hôpitaux de France, cela peut devenir un calvaire pour certaines victimes : chaque jour 8 à 10 personnes se présentent aux urgences à la suite d’un traumatisme crânien léger. Dans 80 % des cas l’évolution est favorable avec une disparition des signes cliniques dans les jours ou les semaines qui suivent. Mais dans 20 % des cas, soit 10 000 victimes par an, des symptômes secondaires apparaissent : c’est le syndrome post-traumatique persistant. Proportionnellement cela semble rassurant, en chiffre absolu c’est un vrai problème de santé publique.


Les caractéristiques du traumatisme crânien léger sont d’abord une identification certaine, généralement par scanner, le premier examen prescrit dès l’entrée à l’hôpital, avec ou sans perte de conscience immédiate, une amnésie d’au moins 30 minutes après l’accident, et plusieurs signes cliniques rapidement dégressifs. La plupart du temps ces patients, après examen, sont renvoyés chez eux avec une feuille de recommandations pour consulter leur médecin traitant.


Le syndrome post-traumatique s’exprime à la fois par des troubles physiques, psychologiques, et comportementaux : une dimension somatique, avec des céphalées, des douleurs cervicales, une fatigue persistante, des vertiges, un sommeil perturbé ou encore une intolérance au bruit. Une dimension cognitive, avec des défaillances de la mémoire, de l’attention, un certain degré d’apathie, des difficultés à traiter les informations qui arrivent normalement au cerveau ; une dimension comportementale, caractérisée par des symptômes anxieux ou dépressifs. Lorsque ce syndrome devient persistant, soit chez environ 10 000 patients chaque année, ces troubles d’intensité variable, vont généralement s’accentuer au cours des mois, suivis d’un cortège de difficultés affectant lourdement la vie quotidienne : impossibilité de reprendre le travail et une vie sociale normale. Le malade vit reclus à son domicile, a besoin d’une assistance pour les actes de la vie de tous les jours. Or, faute d’échelle d’invalidité fiable adaptée à son cas, il ne pourra pas bénéficier de toutes les aides nécessaires.

Le succès de la rééducation précoce

L’objectif de l’étude, financée par la Fondation Paul Bennetot, fondation du Groupe Matmut, était principalement de savoir s’il était possible de prédire les risques d’évolution défavorables et si une prise en charge précoce permettait de limiter ces risques. Disons-le tout de suite, la réponse est oui : une rééducation neuropsychologique immédiate permet d’obtenir chez ces patients, présentant initialement un mauvais pronostic, une récupération quasi identique à celle des patients présentant initialement un bon pronostic. Un résultat fondamental qui mérite d’être largement diffusé et appliqué. Identifier les patients à risque était un défi.


L’étude a confirmé que les techniques d’imagerie modernes, y compris les imageries à résonance magnétique (IRM) les plus sophistiquées, étaient incapables de prédire l’évolution d’un traumatisme crânien léger. Les chercheurs ont défini un modèle de questionnaire très précis, avec des échelles de scores, prenant en compte une large gamme de variables dans trois grandes catégories : plaintes, qualité de vie, tests neuropsychologiques. Un travail minutieux qui a fait appel à toutes les ressources de l’épidémiologie et des logiciels informatiques pour améliorer les performances de cet outil classique qu’est le questionnaire.


Les patients à risque, sélectionnés après un bilan médical soigneux et standardisé, entre deux et trois semaines après l’accident, ont été divisés en deux groupes, l’un sans prise en charge spécifique, comme cela se fait habituellement, l’autre étant pris en charge. La durée du traitement avait été fixée à six mois. Au terme des quinze mois de l’étude, les résultats ont été spectaculaires : parmi les patients de mauvais pronostic, 48 % ont évolué favorablement sans traitement, alors que ce chiffre s’élève à 94 % grâce à une prise en charge spécifique. La différence statistique est parlante : même si en l’absence de traitement, près d’une personne sur deux voit ses symptômes régresser six mois après l’accident, la presque totalité des autres ont tiré un bénéfice incontestable de la rééducation. Incontestablement le pari de suivre une rééducation neuropsychologique, agissant sur les symptômes somatiques et psychologiques, mérite d’être pris.


Cette étude phare de la Fondation Paul Bennetot, fondation du Groupe Matmut, illustre la mission que celle-ci s’est fixée : favoriser la recherche appliquée pour améliorer les pratiques de soins et d’accompagnement et les diffuser largement. Un premier symposium, des publications scientifiques, doivent permettre aux sociétés savantes de rédiger des recommandations pour standardiser cette nouvelle approche. Déjà, au vu des résultats de l’étude, l’agence régionale de santé d’Île-de-France a accordé un budget pour l’ouverture d’un premier centre de référence dans la prise en charge des traumatismes crâniens légers au CHU de Bicêtre en janvier 2015, et ce projet pourrait être étendu à d’autres centres concernés en province. Enfin, il est prévu de suivre une nouvelle cohorte de patients en leur proposant un bilan sous la forme d’un questionnaire réalisable en 20 minutes et qui pourrait, à terme, être proposé aux services d’urgence. La Fondation Paul Bennetot reste dès lors impliquée dans cette nouvelle orientation du projet.

La Fondation Paul Bennetot, fondation du Groupe Matmut : Innover pour préserver l’autonomie

Fondateur de la Matmut en 1962, Paul Bennetot est l’une des grandes figures du mouvement mutualiste. Organisme à but non lucratif, la Fondation qui porte son nom a été créée par le groupe Matmut et la Mutualité Française Seine-Maritime en septembre 2006. Sous égide de la Fondation de l’Avenir, elle s’est donnée pour mission de préserver et favoriser l’autonomie des personnes victimes d’un accident traumatologique ou d’une dépendance liée à une maladie progressive et irréversible. Ceci en favorisant l’innovation et la recherche, mais aussi, très concrètement, en se donnant les moyens de diffuser largement les résultats issus de ce programme de recherche, notamment en collaboration avec les Services de Soins et d’Accompagnement Mutualistes (SSAM) pour contribuer à une meilleure organisation des soins. Elle a fait le choix de se concentrer sur des projets où sa contribution est significative, une démarche exigeante, soutenue par un comité scientifique de qualité pour éclairer la sélection des projets soutenus. Près d’une décennie plus tard, elle a financé 75 projets, investissant 2 millions d’euros.

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