Le Groupe Matmut organise un afterwork placé sous le signe de l’intelligence artificielle et de la Data

Date : 08/02/24

Regards partagés sur l’Intelligence Artificielle et le Big Data

Aujourd’hui, Big Data et IA sont entrés dans le langage commun. Le nombre d’utilisateurs de Chat GPT ne cesse d’augmenter. L’intelligence artificielle interroge : nos interactions et nos choix sont-ils amenés à être impactés ? Nos façons de penser vont-elles être bouleversées par ces nouvelles technologies ?

Pour répondre à ces questions majeures et éclairer les collaborateurs sur ce sujet d’actualité, la Matmut a fait appel à l’un des meilleurs experts du sujet, Luc Julia, co-concepteur de Siri et actuel scientifique de Renault, pour un afterwork exceptionnel.

L’occasion de proposer aux 600 invités présents ou connectés en webinaire de prendre du recul, de faire un pas de côté, de se questionner sur ce sujet d’actualité. Stéphanie Boutin et Stéphane Muller membres du Comex et Olivier Monnier, Chief Data & AI Officer à la Matmut en ont profité pour partager leur propre regard sur les enjeux stratégiques que l’IA et la Data représentent pour un assureur comme la Matmut : ses possibles impacts, les sujets d’éthique que cela soulève, nos craintes et parfois nos fantasmes.

Pour poursuivre le débat, Luc Julia a accepté de répondre à nos questions pour la revue Octave*

Octave, c’est quoi ?
Octave est la revue interne de la Matmut qui aspire à prendre un peu de recul, à penser autrement, enrichir notre culture commune et se questionner sur les sujets qui font notre actualité.

« Les IA ne sont que ce que nous en faisons »

Illustration Édouard Pont

Pour commencer, comment définiriez-vous l’intelligence artificielle ?
Luc Julia : Définir l’IA est complexe car il n’y en a pas qu’une seule. Il faudrait parler des IA, au pluriel.
Ceci étant, j’aime recourir à une image : l’IA comme une boîte à outils. Des outils comme l’humain en fabrique depuis la nuit des temps, pour le suppléer et augmenter ses capacités. Dans l’IA, chaque outil a une fonction précise, qui répond à une tâche spécifique.

Dans votre livre 1, vous proclamez que « l’intelligence artificielle n’existe pas » … À quelle IA faites-vous référence ?
L. J. : À l’IA d’Hollywood ! Celle qui nous fait fantasmer, comme dans le film Her, et celle qui nous fait peur, comme dans Terminator… Ces IA-là, omnipotentes, n’existent pas, et n’existeront jamais.

On parle beaucoup de l’IA « générative ». Assiste-t-on à une nouvelle révolution, celle d’une IA qui crée ?
L. J. : L’IA générative est née au milieu des années 2010, mais on l’a découverte avec l’irruption de ChatGPT, en 2022. C’est un outil puissant : la version 4 de ChatGPT traite 2 700 milliards de données… soit, grosso modo, tout Internet. Mais on se trompe en pensant que l’IA générative crée, car elle exploite des données existantes. Elle remâche le passé, le réassemble – parfois mal, d’ailleurs, car elle fait des moyennes et des erreurs –. La créativité et les idées restent l’apanage de l’utilisateur.

ChatGPT semble pourtant marquer un tournant…
L. J. : Le vraie révolution est en fait ailleurs : dans la démocratisation de l’outil. L’IA générative, très facilement accessible et utilisable, fournit à tout un chacun un nouvel assistant potentiel. Voilà la réelle nouveauté.

Faut-il, selon vous, craindre l’IA ?
L. J. : S’il faut avoir peur, alors c’est plutôt de l’humain ! Comme toute technologie, l’IA est double. Prenez la cybersécurité : l’IA peut à la fois fabriquer de nouveaux virus… et les antivirus qui les stopperont. Les IA ne sont donc, in fine, que ce que nous en faisons. Dans la médecine, la génétique ou les transports, elle peut apporter des progrès extraordinaires.

« L’IA générative, très facilement accessible et utilisable, fournit à tout un chacun un nouvel assistant potentiel. Voilà la réelle nouveauté. »

Comment, dès lors, se prémunir contre les risques de détournement ?
L. J. : Ils existent. Le monde de l’information, parasité par le deepfake (trucage grâce à l’IA, ndlr), en est un bon exemple. Ma réponse : il faut douter, et douter encore ! Se poser des questions, observer, s’éduquer. En somme, savoir de quoi l’IA est capable pour ne pas se laisser piéger.

Le développement de l’IA pose la question de son impact sur une planète en sursis. L’IA est-elle durable ?
L. J. : L’IA est grande consommatrice d’énergie, c’est un problème majeur. On sait par exemple que si l’on adressait à ChatGPT le même nombre de requêtes qu’à Google, l’ensemble des centrales nucléaires de la planète ne suffirait pas… Ce n’est pas viable. Les IA du futur devront être frugales. C’est à mon sens l’un des plus grands défis de la recherche.

Quid, enfin, de l’« IA forte », cette intelligence ultime prédite par certains ?
L. J. : L’IA forte, ou généraliste, c’est le rêve initial, formulé dès les années 1950, de modéliser le cerveau humain. Cela restera un rêve. Nous sommes bien trop compliqués pour être ainsi dupliqués. Techniquement, on ne sait juste pas comment faire. Et même si on y parvenait, à quoi bon, puisque nous existons déjà !

1 L’intelligence artificielle n’existe pas, Luc Julia (First, 2019).

* Extrait de le Revue Octave, Tome 4 - magazine de le Matmut

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